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Diplomacia
est la reconnaissance tardive dun auteur légendaire bahianais.
Alors que sonne lheure de gloire des pépés-caïds
cubains du genre Compay Segundo, Ibrahim Ferrer and co, rendons un hommage
hélas posthume à celui qui fut le grand " diplomate
" de Bahia : Batatinha.
Mais Batatinha nétait
pas un diplomate au sens propre, comme létait Vinicius de
Moraes. Batatinha avait élevé lui la diplomatie au rang
dart de vivre. La diplomatie en tant que dignité et courtoisie.
Quant à poète, il lest largement autant que lauteur
de "Felicidade" et, comme le remarque si justement Cid Teixeira
dans le livret, nombre de poètes officiels donnerait tout pour
avoir écrit de tels vers :
"Meu desespero ninguém vê / Sou diplomado em matéria
de sofrer"
("Personne ne voit mon désespoir, je suis diplomate en
matière de souffrance"). Ces vers-là et beaucoup
d'autres mais toujours avec les mots les plus simples.
Car le grand talent de Batatinha est d'avoir su se mettre dans la peau
de l'homme de la rue, du Bahianais de base et d'exprimer avec la plus
grande émotion les peines qu'il cache derrière un sourire
ou un pas de samba. Batatinha mieux que quiconque aura su évoquer
cette énigme bahianaise, cette fameuse diplomatie qui est le secret
de cette "Terra da felicidade". Le thème est récurrent
dans nombre de ses chansons, la vie est imitation, illusion, ironie. Et
si l'on ne veut pas pleurer, mieux vaut sourire de la tristesse. Et s'oublier
dans la danse, comme dans le refrain de "Direito de sambar"
par exemple : "É proibido sonhar então me deixe o direito
de sambar" ("Il est interdit de rêver alors je m'accorde
le droit de danser le samba").
En deux ou trois occasions, les thèmes sont franchement plus légers.
Sur "Bêbê diferente", le vieil homme est irrésistible
quand il se raconte en bébé jouisseur, biberonneur précoce
d'aguardente et se vantant d'être déjà l'égal
de son père. Ou encore sur "De revolver não",
où on l'entend entouré de ses vieux potes, tous bien rigolards
à l'évocation d'histoires de pêche.
On retrouve aussi bien entendu sur cet album "Hora da razão",
certainement son morceau le plus connu et très fréquemment
repris, de Caetano à Timbalada.
Quant à l'enregistrement lui-même, cette réception
de lambassadeur est un succès. Le gratin est de la fête
: Caetano, Gil, Chico Buarque et Bethânia, rien que ça. Tous
y vont de leur hommage en reprenant, à chaque fois magnifiquement,
une chanson du maître.
Pour l'accompagnement, le bon goût et la discrétion sont
de mise. Très respectueux, Paquito a réalisé un enregistrement
remarquable de finesse et de dépouillement, invitant parfois un
violoncelle ou une flûte pour accompagner les indispensables guitares
et pandeiro. Sans oublier la fidèle caixa de fosforos de
Batatinha, sa boîte dallumettes qui discrètement pose
le rythme du morceau. Et c'est l'art de Batatinha d'accomoder les choses
ou les mots les plus simples pour en tirer la plus grande émotion.
Batatinha, Diplomacia (EMI Brésil-1998)
Olivier Cathus
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