le gredin


BEBEL ET LE SCHMIBLICKINHO

Olivier Cathus


A LA UNE
SOCIOLOGIE
ACTUS SITOYENNES
RENCONTRES
LITTERATURE
CINEMA
MUSIQUE
POST-FESTUM
 

 

Dans la famille Gilberto, j'appelle Bebel, fille de João et Miucha. Avec Tanto Tempo, cette "fille de" veut mettre la bossa, tradition familiale oblige, au goût du jour. C'est louable et d'autres s'y sont déjà collés.
Le moyen le plus simple pour cela est tout simplement de greffer des beats sur les chansons et de confier la production à la nouvelle vague experte ès-électro, Suba en premier lieu (hélas depuis disparu dans l'incendie de sa maison), Amon Tobin, Smoke City ou The Thievery Corporation. Que du beau monde. Sans compter un passage éclair aux percus de Carlinhos Brown et Marcos Suzano.
Pour les chansons, on pioche dans le répertoire de bon ton et on en sort les classiques "Samba da benção" de Vinicius et "Samba e amor" de Chico Buarque (oncle de Bebel, soit dit en passant). Bebel, pour le reste, se colle aux compos et co-écrit une bonne partie de l'album.
Il faut dire qu'exilée depuis 10 ans à New-York ou Londres, on imagine sans peine qu'elle ait de la matière : mal du pays et saudade à revendre. Pourtant, à l'écoute, agréable certes, on se demande où est passée l'émotion. La production reste un peu lisse et la voix de Bebel de même.
La mise au goût du jour a déjà par le passé causé du dégât, Jorge Ben et Gilberto Gil ont ainsi allègrement massacré certaines de leurs plus belles chansons sous le clinquant d'arrangements ayant vite fait de dépasser la date de péremption. Sans vouloir être trop "desafinado" dans le concert de louanges ayant accueilli cet album, on trouvera que l'exercice reste ici très conventionnel, ses discrets "boom-booms" ne valent pas une bonne batida à la guitare.
Ce Tanto tempo nous donne l'occasion de revenir sur la notion de pop internationale que nous suggérions à propos de Marisa Monte : une "MPB sophistiquée, déjà pop internationale". Pourrions-nous reprendre le terme pour décrire la musique de Bebel ? Peut-être. À moins que nous ne soyons tout bonnement dans la variété internationale ? Nuance. Et c'est quoi la nuance ? La nuance, c'est que l'on croirait presque entendre la version moderne d'Astrud, encore une Gilberto, c'est-à-dire la bossa nova calibrée pour le public international, un brin fadouille. En un mot, rien d'original. Bebel ne fait pas avancer le "schmiblickinho" !


Olivier Cathus