PORTO
ALEGRE N'EST PAS DAVOS
En effet, Porto Alegre, la capitale du Rio Grande du Sud, au Brésil,
nest pas Davos, la petite ville suisse où se rassemblent
toutes les années les maîtres du monde. Cela peut
paraître évident, mais il y a quelque chose en plus
qui lie ces deux planètes si différents. Davos est
le siège du néolibéralisme. Porto Alegre,
avec le Forum Social Mondial, qui a eu lieu du 25 au 30 janvier
2001, est devenue le symbole de tous ceux qui se battent contre
Davos.
Le Forum Social Mondial, organisé par la mairie de Porto
Alegre et le gouvernement de létat du Rio Grande
du Sud, avec lappui du Monde Diplomatique, a eu par but
dabriter toutes le manifestations contre la globalisation,
le néolibéralisme et les multinationales qui exploitent
les pauvres de part le monde. Le sommet de deux réunions
a été une téléconférence entre
Davos et Porto Alegre. Dun côté Bernard Cassen,
directeur du Monde Diplomatique et dix représentants dONGs;
de lautre côté, lhomme daffaires
Georges Soros, deux délégués de lONU
et un autre porte-parole des entreprises.
Cétait un dialogue de sourds. Davos parlait de la
marche inexorable de la globalisation. Porto Alegre demandait
de nouveaux chemins pour lavenir. Cassen a demandé
a Soros de faire signer par ses amis de Davos une pétition
pour effacer les dettes des pays du Tiers Monde envers les nations
développées, éliminer les paradis fiscaux
et taxer les capitaux spéculatifs. Soros a ironisé:
il narriverait pas à obtenir beaucoup de signatures.
Porto Alegre a rassemblé dix mille personnes de 125 pays
pour lutter contre lexclusion social. Cétait
une première pour un pays comme le Brésil. Pour
quelques critiques du Forum, on a vu lémergence du
néocommunisme, avec des mots comme globalisation à
la place dimpérialisme; exclus au lieu de prolétariat;
néolibéralisme, pour capitalisme.
Une seule chose est certaine: le Forum Social Mondial a mis Porto
Alegre dans la carte internationale des villes engagées
dans la construction dun autre avenir. Mais lequel? Pendant
la rencontre José Bové et ses amis du mouvement
brésilien des Sans Terre ont attaqué une ferme de
la multinational Monsanto pour détruire des plantes transgéniques.
Lagriculteur français a été expulsé
du Brésil en raison de son acte. McDonalds a été
aussi la cible de la fureur des militants en quête de chats
capitalistes à fouetter.
À la fin du Forum les gens ne savaient pas quelles propositions
nouvelles avaient été présentées.
Lessentiel nétait pas là, mais dans
le fait quon avait communié ensemble, vibré
à lunisson, actualisé la foi dans une utopie
un peu malmenée depuis la chute du mur de Berlin. À
Porto Alegre, avec Davos comme sparring, la gauche a eu sa revanche.
Non sans raison.
La France a eu une place dhonneur dans tout cela, avec la
participation de Danielle Mitterrand, de Jean-Pierre Chevenement,
de deux ministres de Jospin et de plusieurs intellectuels, journalistes,
militants, etc. Plus saluée que la France, seulement Cuba.
Même Ricardo Alarcon, président du parlement cubain,
a été honoré comme une victime de lembargo
américain.
Olivio Dutra, gouverneur du Rio Grande du Sud, Tarso Genro, maire
de Porto Alegre, Martha Suplicy, maire de São Paulo, parmi
dautres représentants du Parti des Travailleurs,
se sont mis en évidence comme les responsables pour une
nouvelle ère pour le rêve dun monde meilleur.
Cest vrai que parfois on a trop entendu les échos
dune époque ancienne de croyance dans les vieilles
vertus du marxisme. Par contre, on a entendu aussi un cri qui
a enterré la possibilité dune pensée
unique. Dorénavant, il faut à nouveau croire à
la polyphonie.
|