Dossier Date : 15 mai 2001 par Juremir Machado da Silva

PORTO ALEGRE N'EST PAS DAVOS


En effet, Porto Alegre, la capitale du Rio Grande du Sud, au Brésil, n’est pas Davos, la petite ville suisse où se rassemblent toutes les années les maîtres du monde. Cela peut paraître évident, mais il y a quelque chose en plus qui lie ces deux planètes si différents. Davos est le siège du néolibéralisme. Porto Alegre, avec le Forum Social Mondial, qui a eu lieu du 25 au 30 janvier 2001, est devenue le symbole de tous ceux qui se battent contre Davos.
Le Forum Social Mondial, organisé par la mairie de Porto Alegre et le gouvernement de l’état du Rio Grande du Sud, avec l’appui du Monde Diplomatique, a eu par but d’abriter toutes le manifestations contre la globalisation, le néolibéralisme et les multinationales qui exploitent les pauvres de part le monde. Le sommet de deux réunions a été une téléconférence entre Davos et Porto Alegre. D’un côté Bernard Cassen, directeur du Monde Diplomatique et dix représentants d’ONGs; de l’autre côté, l’homme d’affaires Georges Soros, deux délégués de l’ONU et un autre porte-parole des entreprises.
C’était un dialogue de sourds. Davos parlait de la marche inexorable de la globalisation. Porto Alegre demandait de nouveaux chemins pour l’avenir. Cassen a demandé a Soros de faire signer par ses amis de Davos une pétition pour effacer les dettes des pays du Tiers Monde envers les nations développées, éliminer les paradis fiscaux et taxer les capitaux spéculatifs. Soros a ironisé: il n’arriverait pas à obtenir beaucoup de signatures.
Porto Alegre a rassemblé dix mille personnes de 125 pays pour lutter contre l’exclusion social. C’était une première pour un pays comme le Brésil. Pour quelques critiques du Forum, on a vu l’émergence du néocommunisme, avec des mots comme globalisation à la place d’impérialisme; exclus au lieu de prolétariat; néolibéralisme, pour capitalisme.
Une seule chose est certaine: le Forum Social Mondial a mis Porto Alegre dans la carte internationale des villes engagées dans la construction d’un autre avenir. Mais lequel? Pendant la rencontre José Bové et ses amis du mouvement brésilien des Sans Terre ont attaqué une ferme de la multinational Monsanto pour détruire des plantes transgéniques. L’agriculteur français a été expulsé du Brésil en raison de son acte. McDonald’s a été aussi la cible de la fureur des militants en quête de chats capitalistes à fouetter.
À la fin du Forum les gens ne savaient pas quelles propositions nouvelles avaient été présentées. L’essentiel n’était pas là, mais dans le fait qu’on avait communié ensemble, vibré à l’unisson, actualisé la foi dans une utopie un peu malmenée depuis la chute du mur de Berlin. À Porto Alegre, avec Davos comme sparring, la gauche a eu sa revanche. Non sans raison.
La France a eu une place d’honneur dans tout cela, avec la participation de Danielle Mitterrand, de Jean-Pierre Chevenement, de deux ministres de Jospin et de plusieurs intellectuels, journalistes, militants, etc. Plus saluée que la France, seulement Cuba. Même Ricardo Alarcon, président du parlement cubain, a été honoré comme une victime de l’embargo américain.
Olivio Dutra, gouverneur du Rio Grande du Sud, Tarso Genro, maire de Porto Alegre, Martha Suplicy, maire de São Paulo, parmi d’autres représentants du Parti des Travailleurs, se sont mis en évidence comme les responsables pour une nouvelle ère pour le rêve d’un monde meilleur. C’est vrai que parfois on a trop entendu les échos d’une époque ancienne de croyance dans les vieilles vertus du marxisme. Par contre, on a entendu aussi un cri qui a enterré la possibilité d’une pensée unique. Dorénavant, il faut à nouveau croire à la polyphonie.

 
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