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Du pays Béti
à lÉrythrée en passant par Bruxelles, suivons
quelques dames en voix traçant les voies de lâme, ce
qui demeure lessentiel en musique.
Dun
côté, Sally Nyolo, de lautre Marie Daulne. Toutes deux
furent de laventure Zap Mama, formation montée par la seconde.
Pour lanecdote, elles ont aussi en commun davoir enregistré
(mais séparément) pour Michaël Franti et son groupe
hip-hop/soul Spearhead. Avec Zap Mama, elles avaient touché le
grand-public par leurs chants a cappella, libres adaptations de polyphonies
africaines. Aujourdhui, la sortie quasi-simultanée de leurs
deux albums vient témoigner combien leurs voix ont pu suivre des
voies opposées.
Désormais
seule à la barre, menant son équipage et ses choristes à
sa guise, Marie Daulne est Zap Mama ou, plus exactement, " Zap Mama
is Marie Daulne ", dixit le livret. Toujours est-il, Zap Mama
porte aujourdhui bien son nom : sur A Ma Zone (Virgin),
Marie Daulne zappe allègrement dun genre à lautre
(funk, drumn bass, hip-hop, " à la Björk "),
comptant sur sa voix ou une coloration "urbaine" pour faire
lien, et mêle aux breakbeats des instruments plus traditionnels
tel le gumbri gnaoui. Nos paysages culturels sillustrent
certes par la diversité et léclatement mais, ici,
on narrive pas réllement à saisir le sens de la démarche.
La touche urbano-électronique a beau confirmer une nouvelle évolution
de Zap Mama, à trop se jeter dans toutes les directions, on finit
par tourner en rond. Et par aller nulle part. Et doit-on se moquer de
linvasion des téléphones cellulaires dans notre quotidien,
comme cest le cas ici, si lon nest pas capable de poser
sa " zappounette " cinq minutes ? Un album agréable,
bien fait, mais un peu fade et en manque de sève... Dâme
quoi
À linverse, pour Béti (Lusafrica/naïve),
son troisième album, après Tribu et Multiculti,
Sally Nyolo a choisi deffectuer un retour aux sources. Elle
a donc enregistré une partie de son album au Cameroun, pays quelle
a quitté pour la France à lâge de 13 ans. Le
but de ce voyage était de retrouver les racines du bikutsi,
genre désormais aussi célèbre que le makossa. Hors
tradition, le bikutsi fut électrifié (notamment par les
peinturlurés Têtes Brulées) pour faire du balloche
urbain. Ici, cest dans la forêt, auprès des femmes
béti qui lavaient créé que Sally Nyolo est
revenue aux origines de ce rythme. Si sa musique est toujours centrée
sur les voix et le rythme (le chant lui-même sans se livrer à
des jeux de percussion vocale, est profondément rythmique), elle
découvre en pays Béti linfluence de lenvironnement
: "ces femmes vivent dans un son ambiant puissant, elles respirent
la nature et sorchestrent par-dessus". En ayant su capter
lâme et la vibration originelle du bikutsi, Sally Nyolo poursuit
un itinéraire musical des plus intéressants.
Traversons
lAfrique jusquà sa corne. Plus arride et dépouillé
après la luxuriance béti, Numey (Cobalt) de
Faytinga. La chanteuse érythréenne enregistre là
son premier disque après être entrée dans la lutte
armée pour la libération dès ladolescence.
Sans fioritures, accompagnée du krar (lyre) et de percussions,
dune voix haute, elle égrène ses compositions inspirées
des traditions et rythmes kunama et tigrinya. Loccasion de découvrir
la musique dune région méconnue.
Olivier
Cathus
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