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AFRO-CUBAN ALL STARS
Distinto, diferente

Olivier Cathus


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Alors que l’album Buena Vista Social Club est désormais disque de platine en France (300 000 exemplaires) et qu’il s’en est vendu plus de deux millions et demi dans le monde, que l’album d’Ibrahim Ferrer fut un beau succès l’été dernier, c’est la première fois, avec ce deuxième album des Afro-Cuban All Stars, que l’on voit sur le devant de la scène la bonne bouille de gros ours de celui qui joua un rôle prépondérant dans toutes ces réalisations : Juan de Marcos Gonzalez.
L’homme aux dreadlocks et au béret était curieusement (injustement ?) resté dans l’ombre jusque-là, c’est pourtant lui qui présenta à Ry Cooder la plupart des participants de l’album Buena Vista Social Club, organisant avec Nick Gold, patron du label World Circuit, les sessions de ce qui était initialement prévu comme une rencontre entre musiciens cubains et ouest-africains. Depuis, on connaît l’histoire, il n’y eut pas de musiciens africains et l’album fut une des meilleures et plus grosses surprises de ces dernières années. À l’occasion de ces sessions, dans les légendaires Studios Egrem, pour l’excellent label anglais World Circuit, s’enregistrait aussi le premier album des Afro-Cuban All Stars dont Juan de Marcos Gonzalez était le leader et le fondateur. Avec cet ensemble de musiciens de trois générations différentes (de 13 ans à plus de 80), il voulait contribuer à la remise en valeur du patrimoine musical cubain.
Ce qu’il faisait depuis plus de vingt ans déjà. En 1978, il fonda le groupe Sierra Maestra destiné à jouer le répertoire cubain sur la forme d’un septeto traditionnel et où lui-même tenait le tres. Mais ce Docteur en Agronomie de formation avait de la suite dans les idées : avec les Afro-Cuban All Stars, c’est cette fois-ci le big band cubain des 50’s qu’il ressucitait. Il voulait faire redécouvrir les vieilles gloires oubliées et retraitées de cet " âge d’or " de la musique cubaine. C’est ainsi qu’il alla retrouver Ruben Gonzalez qui n’avait même plus de piano chez lui, ou Ibrahim Ferrer, égaré cireur de chaussures...
Avec ce big band qui additionne l’expérience des uns à l’énergie des autres, le pari fut gagné haut-la-main.
Aujourd’hui, on retrouve à quelques variantes près le même équipage All Star. Mais sont également embarquées dans l‘aventure deux grandes dames qui donnaient déjà la réplique à Ibrahim Ferrer sur son album : Maria Teresa Caturla et l’incontournable et magnifique Omara Portuondo (dont un album est à sortir cette année, toujours sur World Circuit, impatience...), ainsi que le jeune flutiste virtuose Orlando " Maraca " Valle.
Si l’album est également ouvert à la moderne timba (sur le morceau "Reconciliacion" visant à aplanir les querelles entre Cubains et exilés), on retrouve sur ce classieux Distinto, diferente les colorations du précédent A toda Cuba le gusta. Pour notre plus grand bonheur, celui-ci nous gusta à nous aussi.


 

Olivier Cathus